Note d'analyse 147 | Mettre en valeur(s) la biodiversité : état des lieux et perspectives

En France, l’évaluation monétaire de la nature suscite un intérêt marqué depuis la parution du rapport Chevassus-au-Louis en 2009. Mais elle soulève également des questions légitimes, notamment en matière de méthodes et d’utilité pour les décisions publiques comme privées.

Publié le : 18/03/2025

Mis à jour le : 25/03/2025

Selon que l’on retienne les estimations de l’Évaluation française des écosystèmes et des services écosystémiques (Efese) ou de la Commission européenne, la valeur monétaire associée à huit services écosystémiques en France se situe entre 18 et 49 milliards d’euros par an, soit 0,6 % à 1,8 % du PIB. Ces estimations ne peuvent cependant être interprétées comme la valeur de la nature en France. Il ne s’agit en effet que de l’agrégation de valeurs associées à un nombre limité de services écosystémiques, comme le service de récréation dans la nature (entre 5,8 et 29 milliards d’euros par an), ou la contribution de la pollinisation à la production agricole (entre 0,5 et 3,8 milliards d’euros par an). De plus, elles ne tiennent pas compte des valeurs de non-usage associées à la nature : l’évaluation du service de pollinisation ne prend ainsi pas en compte la contribution des pollinisateurs à la stabilité et au fonctionnement des écosystèmes. Par conséquent, ces données ne permettraient pas de décrire de façon satisfaisante la contribution de la nature à la richesse nationale au sein des comptes de l’environnement.

Les valeurs marginales de services écosystémiques, souvent exprimées en euros par hectare, peuvent servir de valeurs de référence pour l’évaluation socioéconomique de projets d’investissement. Par exemple, la valeur de référence du service de séquestration de carbone est en moyenne de 240 000 euros par hectare dans les zones humides. De telles valeurs de référence pourraient être développées pour de nombreux autres services écosystémiques (usages récréatifs, purification de l’eau, etc.).

L’évaluation monétaire peut ainsi éclairer des décisions publiques ou privées ayant un impact sur l’état des écosystèmes et des services écosystémiques. Les limites méthodologiques de ces évaluations nécessitent de les compléter par des approches non monétaires, et plus généralement par des processus délibératifs, afin de prendre en compte l’ensemble des valeurs relatives à la biodiversité mais aussi de renforcer l’acceptabilité des décisions.

Valeurs de référence du service de séquestration du carbone dans différents types d’écosystèmes

Lecture : les valeurs de référence des zones  humides sont comprises entre 75 210 euros  par hectare et 395 816 euros par hectare,  avec une médiane de 212 875 euros par hectare et une moyenne de 240 373 euros par  hectare. Chaque boîte à moustache montre  la médiane (ligne horizontale), la moyenne  (croix), les 1er et 3e  quartiles (bords de la boîte)  et les valeurs extrêmes.

Note : les données présentées dans le rapport de l’Efese ont été mises à jour par France Stratégie avec les valeurs d’action pour le climat  pour 2024 de la trajectoire élaborée en 2019,  et regroupées par grand type d’écosystème.

Source : CGDD (2019) ; traitement : France  Stratégie

Auteurs

Introduction

À l’échelle mondiale comme à l’échelle de la France, les chiffres témoignant de l’érosion de la biodiversité sont éloquents : au niveau mondial, sur huit millions d’espèces d’animaux et de plantes identifiées, près de un million sont menacées d’extinction [1]- c’est notamment le cas du vison d’Europe. En France, 44 % des populations d’oiseaux communs spécialistes des milieux agricoles, comme l’alouette des champs, ont disparu de l’hexagone entre 1989 et 2023 [2].

Parmi les réponses apportées à cette crise, le cadre mondial pour la biodiversité, adopté en décembre 2022 à Montréal lors de la 15e réunion des parties à la Convention sur la diversité biologique[3], prévoit l’intégration des multiples valeurs de la biodiversité dans l’ensemble des politiques et processus de planification d’ici 2030 [4]. L’objectif est de renforcer la protection de la biodiversité en rendant visible l’ensemble des interdépendances entre sociétés et biodiversité.

En effet, à ce jour l’évaluation et la mobilisation des valeurs de la biodiversité dans les processus de décision restent peu développées. La Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (Intergovernmental Science-Policy Platform on Biodiversity and Ecosystem Services — IPBES) estime ainsi à 5 % la part des évaluations dont les résultats sont mobilisés dans des processus décisionnels[5], sans que l’on soit en capacité de comparer ce chiffre avec celui prévalant pour d’autres politiques publiques. Par ailleurs, l’évaluation monétaire de la biodiversité reste peu utilisée et ne fait pas toujours consensus.

Dans un premier temps, cette note décrit les multiples valeurs associées à la biodiversité et les méthodes permettant de les évaluer, notamment d’un point de vue monétaire. Elle propose ensuite une analyse critique de certaines valeurs monétaires concernant la France. La note explore enfin les utilisations possibles de ces valeurs dans le cadre de la planification écologique.

Définir et évaluer la valeur de la biodiversité

Diversité des valeurs de la biodiversité 

D’après la Convention sur la diversité biologique, la biodiversité désigne « la variabilité des organismes vivants de toute origine, y compris les écosystèmes terrestres, marins et autres écosystèmes aquatiques, ainsi que les complexes écologiques dont ils font partie[6] ». La notion de biodiversité englobe ainsi un ensemble d’entités et de processus, tels que des espèces, des écosystèmes ou des fonctions écologiques, qui peuvent faire l’objet d’évaluations[7]. Les termes de biodiversité et de nature sont ici employés comme synonymes.

L’érosion de la biodiversité, attribuable aux pressions d’origine humaine, questionne nos relations avec la nature : pour quelles raisons importe-t-il de préserver la biodiversité ? Les réponses à cette question sont multiples, et dépendent des interlocuteurs : pour des raisons spirituelles, éthiques ou esthétiques, parce que nous en avons besoin pour nous nourrir, pour respirer, parce que c’est un patrimoine, etc. Cette diversité de réponses traduit la diversité des valeurs attachées à la nature.

Il existe plusieurs typologies décrivant la diversité des valeurs associées à la biodiversité (voir Encadré 1 et Tableau 1). Parmi celles-ci, l’IPBES classe ces valeurs en trois catégories[8]. La première correspond aux valeurs instrumentales : « la nature pour l’homme ». Dans ce cadre, la valeur de la nature découle des usages qu’on en fait, comme récolter du bois, se promener en forêt ou boire une eau pure. La deuxième correspond aux valeurs relationnelles : « la nature pour la culture ». C’est alors la relation entre l’humain et la nature qui génère de la valeur ; par exemple, je peux être attaché à la protection d’une forêt sans pour autant m’y promener ou y chasser.

La troisième catégorie correspond aux valeurs intrinsèques : « la nature pour la nature ». Elles reposent sur l’idée que la nature a une fin en soi, et une valeur indépendante d’objectifs ou de jugements humains. S’inscrivant dans une perspective non anthropocentrée, elles peuvent difficilement être évaluées puisqu’ « il n’y a pas de valeur sans évaluateur », comme le souligne le rapport Chevassus-au-Louis (2009).

Il existe différentes typologies des valeurs de la nature, dont le point commun est la distinction entre valeurs d’usage et de non-usage : la biodiversité importe pour l’usage que nous en faisons, mais également pour des raisons patrimoniales, esthétiques ou spirituelles. Dans la plupart des cas, il s’agit d’une approche anthropocentrée des rapports à la nature, avec une valeur analysée du seul point de vue des préférences des humains.

À la suite de l’Évaluation des écosystèmes pour le millénaire (Millennium Ecosystem Assessment) de 2005[9], des travaux tels que le rapport Chevassus-au-Louis (2009)[10], l’initiative mondiale Économie des écosystèmes et de la biodiversité (The Economics of Ecosystems and Biodiversity)[11] ou le rapport Dasgupta (2021)[12] ont privilégié une approche anthropocentrée, tout en reconnaissant la multitude et la complexité des perspectives associées à la nature (voir Tableau 1).

La typologie retenue par l’Évaluation française des écosystèmes et services écosystémiques (Efese) s’inscrit également dans une perspective anthropocentrée, et retient deux principales catégories de valeurs[13][14]. La valeur utilitaire, équivalente à la notion de valeur instrumentale de l’IPBES, qualifie la « capacité de l’écosystème à fournir durablement des biens et services écosystémiques ». La valeur patrimoniale est une valeur attribuée à quelque chose indépendamment de son utilité, pour des raisons essentiellement culturelles ou personnelles ; on peut la considérer comme équivalente à la notion de valeur relationnelle proposée par l’IPBES.

Comme le souligne l’IPBES, les valeurs instrumentales, relationnelles et intrinsèques ne sauraient décrire l’ensemble des perspectives vis-à-vis de la nature. Elles représentent des rapports à la nature (anthropocentrés ou non) et correspondent à des évaluations différentes selon le système de connaissance utilisé (académique, indigène, local), et les dimensions dans lesquelles on souhaite les évaluer comme la liberté ou la justice (difficiles à exprimer avec des indicateurs physiques, monétaires ou socioculturels)[15]. Par exemple, reconnaître diverses valeurs permet de renforcer les dimensions d’équité d’une décision et de justice, notamment en matière de répartition des contributions de la nature aux populations.

Le Tableau 1 met en perspective ces différentes typologies les unes avec les autres, mais ne saurait constituer une comparaison définitive. On peut globalement retenir que les principales différences résident d’une part dans le recours (ou non) à une approche anthropocentrée, et d’autre part dans la définition des valeurs d’usage et de non-usage.

Principales typologies de valeurs considérées

Note : les services écosystémiques relèvent uniquement de valeurs d’usage. Notons que les termes « valeurs d’usage », « valeurs instrumentales » et « valeurs utilitaires » sont équivalents. Hormis les valeurs intrinsèques, chacune de ces valeurs peut faire l’objet d’évaluations monétaires. Enfin, pour les définitions précises  des termes de la dernière ligne, voir le rapport Chevassus-au-Louis (2009). 

Source : construction des auteurs sur la base de la littérature publiée par les différents organismes cités

Les travaux d’évaluation de la biodiversité s’attachent surtout à décrire les valeurs instrumentales, c’est-à-dire les valeurs associées à une utilisation de la biodiversité. Dans son évaluation des multiples valeurs de la nature, l’IPBES estime en effet que sur 1 163 études recensées, 74 % relèvent de valeurs instrumentales, 20 % de valeurs intrinsèques et 6 % de valeurs relationnelles[16]. Cette dominance des valeurs instrumentales dans les évaluations traduit le fait que ces valeurs sont souvent mieux définies et moins difficiles à évaluer.

Les valeurs instrumentales sont souvent associées à la notion de service écosystémique, défini au sein du programme Efese comme l’utilisation par l’homme des écosystèmes à son avantage[17]. Les services écosystémiques peuvent être classés en trois catégories : les services d’approvisionnement, qui correspondent à la consommation de biens issus des écosystèmes (produits de l’agriculture et de la pêche, etc.) ; les services de régulation, qui correspondent au fait de bénéficier des fonctions de régulation des écosystèmes (prévention de l’érosion des sols et des glissements de terrain, régulation du climat, de la qualité de l’eau, etc.) ; et enfin les services culturels, qui correspondent à la contribution des écosystèmes aux activités de loisir (promenade en forêt, observation naturaliste, etc.). Comme il apparaît clairement dans le tableau 1, les valeurs de la biodiversité ne sauraient cependant se limiter aux valeurs d’usage associées aux services écosystémiques.

Diversité des méthodes d’évaluation 

La diversité de valeurs associées à la biodiversité peut être appréhendée par une multitude de méthodes d’évaluation, qualitatives ou quantitatives. L’IPBES distingue quatre familles : les méthodes fondées sur la nature, sur les comportements, sur les déclarations, et les méthodes intégrées (voir Encadré 2)

Les méthodes fondées sur la nature cherchent à caractériser et décrire la biodiversité et les écosystèmes d’un point de vue biophysique. En particulier, elles permettent de mesurer en termes biophysiques les fonctions écologiques et services écosystémiques dont dépendent nos sociétés. Par exemple, il est possible d’estimer les quantités annuelles de carbone séquestrées par les feuilles des herbiers sous-marins ou par les racines des mangroves.

Les méthodes fondées sur les comportements reposent sur l’analyse de comportements observés. Il peut s’agir par exemple d’évaluer l’attrait d’un espace naturel en estimant sa fréquentation touristique. En termes monétaires cette famille de méthodes s’appuie sur les prix et les coûts observés. Il peut s’agir d’observations directes, via les prix de marché, ou d'observations indirectes.

Dans ce cadre, la méthode des coûts de déplacement consiste à récolter des données sur la distance au site, ce qui fournit un coût de transport, et le nombre de visites[18]. Cela permet de construire une fonction de demande pour la visite de ce site, qui prend en compte les éventuelles substitutions avec les sites proches et semblables. La valeur du site correspond alors au surplus individuel moyen que procure une visite à un individu. L’avantage de cette méthode est qu’elle repose sur l’observation de comportements réels et non hypothétiques. Les inconvénients proviennent de la difficulté à évaluer la valeur du temps pendant le transport.

Les méthodes fondées sur les déclarations reposent sur l’administration de questionnaires. Des enquêtes sociologiques permettent par exemple de décrire qualitativement les principales valeurs mises en avant par certains groupes vis-à-vis de la biodiversité. C’est notamment le cas des études qui s’intéressent aux peuples indigènes et aux communautés locales. Certaines de ces méthodes permettent également des évaluations monétaires : l’évaluation contingente, l’analyse conjointe traditionnelle et, plus récemment, les « expériences de choix discrets ». L’évaluation contingente permet d’évaluer le consentement à payer de répondants pour différents scénarios, comme des scénarios de protection de la biodiversité. L’analyse conjointe traditionnelle et les expériences de choix discrets reposent sur un principe similaire, mais les répondants doivent choisir entre plusieurs situations caractérisées par différents attributs (niveaux de services écosystémiques par exemple) et par un niveau de coût. Il est ainsi possible d’évaluer la valeur monétaire associée à chaque attribut. Ces analyses font l’objet de certaines critiques discutées infra.

Les méthodes intégrées combinent les résultats d’autres familles de méthodes, et notamment des évaluations biophysiques de services via des fonctions de production. Par exemple, l’Efese a évalué d’un point de vue monétaire le service de pollinisation des cultures en mobilisant des données de prix, de production agricole, et de dépendance des cultures aux pollinisateurs[19].

Les types de valeurs représentés dans les évaluations dépendent des méthodes utilisées. Ainsi, les méthodes découlant de l’observation des comportements reflètent principalement des valeurs d’usage. Au contraire, celles qui s’appuient sur les déclarations permettent également de refléter des valeurs de non-usage, dans le cadre d’évaluations qualitatives ou quantitatives. Les limites des approches qui reposent sur les déclarations pour des évaluations monétaires sont détaillées ci-après.

Au niveau mondial, les évaluations fondées sur la nature représentent 68 % des études recensées (voir Graphique 1). Il peut s’agir d’études qualitatives à partir de dire d’expert, ou d’études quantitatives de services écosystémiques comme la séquestration de carbone dans les écosystèmes. Cela signifie que les valeurs de la biodiversité sont fréquemment approchées via une meilleure compréhension de certains processus écosystémiques. Ainsi, 50 % des indicateurs recensés sont des indicateurs biophysiques, comme le flux de carbone séquestré par un écosystème ou le volume d’eau purifié.

Les autres types de méthodes, qui s'appuient davantage sur des approches socioculturelles et économiques, représentent 32 % des études recensées. Elles produisent par ailleurs 47 % des indicateurs recensés, dont 26 % d’indicateurs monétaires (comme la valeur monétaire d’un service écosystémique) et 21 % d’indicateurs socioculturels (comme la fréquentation d’un espace naturel). Ces résultats montrent l’importance de l’approche économique des valeurs de la biodiversité.

En France, ces quatre familles de méthode d’évaluation ont été mobilisées, notamment dans le cadre du programme Efese[20]. Elles ont permis de renforcer la compréhension des multiples services écosystémiques fournis par les grands types d’écosystèmes présents en France (agricoles, forestiers, marins, aquatiques continentaux, urbains et rocheux).

Représentation des types de méthodes et d’indicateurs dans la base de données d’évaluations construite par l’IPBES

Lecture : sur 1163 études recensées par l’IPBES dans son évaluation des multiples valeurs de la nature, 68 % relèvent de méthodes fondées sur la nature, et 50 % produisent des indicateurs biophysiques. 

Source : IPBES (2022)

Méthodes utilisées dans les études recensées dans la base de données ESVD

Lecture : la méthode des prix de marché est utilisée dans 27 % des évaluations recensées dans la base de données ESVD. Elle appartient à la famille des méthodes  fondées sur les comportements, qui représentent 59 % des évaluations recensées. 

Source : Ecosystem Services Valuation Database (ESVD) ; traitement : France Stratégie

Particularités de l’évaluation monétaire 

Parmi les indicateurs recensés par l’IPBES dans son évaluation des multiples valeurs de la nature, 26 % sont des indicateurs monétaires (voir Graphique 1). L’évaluation monétaire des éléments de biodiversité, qui cherche à quantifier en termes monétaires la contribution de la nature au bien-être des populations humaines, est donc une pratique répandue[21]

Présentation des principales méthodes

La base de données ESVD (Ecosystem Services Valuation Database)[22] recense au niveau mondial une dizaine de milliers d’évaluations monétaires de services écosystémiques. Le graphique 2, page suivante, présente les méthodes d’évaluation utilisées, ainsi que leur fréquence (en pourcentage d’occurrences). La grande majorité des évaluations menées appartient à la famille des méthodes fondées sur les comportements. Parmi celles-ci, 27 % des évaluations recensées reposent sur des prix de marché et 24 % sur des évaluations de coûts (coût des dommages évités, coût de remplacement, etc.). Près de 30 % d’évaluations appartiennent à la famille des méthodes reposant sur les déclarations (évaluation contingente, analyse conjointe traditionnelle et expériences de choix discrets). Le reste est constitué de méthodes intégrées et d’autres types de méthodes comme le transfert de valeurs déjà existantes[23].

Les méthodes fondées sur les prix de marché sont les plus fréquentes car elles sont aisées à mettre en œuvre. Il suffit en effet de disposer de données sur les prix de biens issus des écosystèmes comme des poissons ou du bois[24], ou de services culturels comme des activités touristiques en pleine nature pour fournir une estimation. Le rapport de la première phase de l’Efese estime ainsi à 80 milliards d’euros par an le chiffre d’affaires[25] des activités économiques dont les écosystèmes français sont le support[26], dont 57 % sont attribuables aux grandes cultures et 32 % à l’élevage.

Les méthodes fondées sur les coûts sont très diverses. Les coûts des dommages évités sont principalement mobilisés pour évaluer les services écosystémiques associés à l’atténuation des risques d’incendies, de glissements de terrain ou d’inondations. Les coûts de remplacement sont surtout utilisés pour évaluer des services de régulation, comme celle de la qualité de l’eau. Les méthodes de coûts de déplacement sont essentiellement employées pour estimer la valeur associée à des services récréatifs, c’est-à-dire associés aux loisirs de nature.

Les méthodes mises en œuvre par le Centre commun de recherche (Joint Research Centre – JRC) de la Commission européenne dans ses évaluations monétaires de services écosystémiques[27] appartiennent toutes à la famille des méthodes fondées sur les comportements. Il s’agit principalement d’évaluations qui s’appuient sur les prix de marché ou sur les coûts observés (voir Tableau 2). Les résultats de ces évaluations sont présentés dans la section 2.

Méthodes d’évaluation monétaire de services écosystémiques utilisées par le JRC

Note : la rétention des sols correspond à la capacité des écosystèmes de réduire l’érosion due aux précipitations. 

Source : Vallecillo et al. (2022)

Les méthodes fondées sur les déclarations, comme l’évaluation contingente et l’analyse conjointe, ont l’avantage d’être en mesure de représenter des valeurs d’usage et de non-usage, alors que les méthodes précédemment évoquées ne représentent que des valeurs d’usage.

Les valeurs monétaires obtenues par ces approches peuvent s’interpréter comme la valeur des services écosystémiques perdus en cas de dégradation ou de destruction des écosystèmes les soutenant. Une approche alternative de monétarisation consiste à évaluer les coûts de restauration ou de maintien des écosystèmes en bon état, c’est-à-dire « les coûts que l’économie aurait dû supporter pour éviter la dégradation des actifs naturels ou qu’elle devrait supporter pour les restaurer ou les compenser par des actifs équivalents[28] ». Cette approche, développée notamment dans le rapport Efese sur les milieux marins[29], part du principe que les coûts nécessaires à l’atteinte d’un objectif de bon état écologique sont plus directement accessibles et utilisables, notamment pour des exercices de comptabilité.

Critiques associées aux évaluations monétaires 

L’évaluation monétaire de la biodiversité est soumise à plusieurs critiques portant sur l’opérationnalité des valeurs obtenues, la fiabilité des méthodes et leurs conséquences en termes de justice sociale.

Les principales critiques relatives à l’opérationnalité des valeurs concernent les tentatives visant à calculer la valeur économique totale de la biodiversité et des services écosystémiques. En particulier, Costanza et al. (1997) avaient estimé la valeur de dix-sept services écosystémiques au niveau mondial et avaient obtenu une valeur moyenne de 33 000 milliards de dollars[30] par an, un chiffre bien supérieur au PIB mondial. Ces valeurs sont souvent interprétées comme des valeurs totales de la biodiversité, alors qu’il ne s’agit que d’agrégations partielles, fondées sur le recueil de données disponibles. Plus généralement, dans la mesure où la disparition totale de certains services écosystémiques pourrait compromettre la vie humaine elle-même, l’interprétation de ces estimations agrégées ainsi que leur capacité à éclairer l’action publique peuvent poser question.

La fiabilité des méthodes mobilisées peut également être mise en cause. En ce qui concerne les valeurs d’usage, l’interdépendance des éléments constitutifs de la biodiversité − la dégradation d’un écosystème pouvant avoir des effets en cascade sur de multiples services écosystémiques − rend toute modélisation difficile, qu’il s’agisse d’évaluations biophysiques ou monétaires.

Mais ce sont les valeurs de non-usage qui font l’objet des critiques les plus vives. Celles-ci ne peuvent être estimées qu’à partir de méthodes fondées sur des déclarations, pour lesquelles un risque de biais hypothétique ne peut jamais être totalement écarté et dont les résultats dépendent largement de la façon dont le questionnaire est conçu[31][32]. Fondamentalement, ces méthodes reposent sur l’hypothèse d’une certaine substituabilité entre les actifs naturels et les autres biens, qui peut être contraire à l’éthique de certaines personnes interrogées[33]. En outre, l’agrégation des consentements à payer individuels peut également poser question sur le plan de la justice sociale puisqu’elle conduit à accorder un poids plus important aux préférences des personnes aisées qu’à celles des personnes contraintes de consacrer l’essentiel de leurs ressources à leur propre subsistance.

Enfin, des valeurs obtenues dans un contexte d’étude, par exemple le consentement à payer de riverains pour des travaux de renaturation, sont régulièrement « transférées » dans d’autres contextes, ce qui constitue une source de fragilité supplémentaire.

Évaluation monétaire de la biodiversité en France

 En France, à la suite de la parution du rapport Chevassus-au-Louis de 2009[34], le ministère chargé de l’Environnement a lancé en 2012 le programme Efese. L’objectif de ce programme est d’éclairer les multiples valeurs de la biodiversité pour mieux les intégrer dans les processus de décision, publics comme privés[35]. Pour cela, l’Efese mobilise des chercheurs de multiples disciplines pour produire des évaluations, monétaires ou non, s’appuyant sur une diversité de méthodes. En lien avec l’Efese, l’Ifrecor (Initiative française pour les récifs coralliens) a également publié un rapport sur les valeurs socioéconomiques des récifs coralliens et écosystèmes associés[36].

Le Joint Research Centre (JRC) a cherché à évaluer et cartographier les services écosystémiques des États membres de l’Union européenne en mobilisant les méthodes présentées dans le tableau 2[37]. En particulier, le JRC a initié les bases d’une comptabilité biophysique et monétaire des écosystèmes européens, dans le cadre du programme INCA[38].

L’Efese et le JRC ont cherché, lorsque cela était faisable et pertinent, à évaluer d’un point de vue monétaire certains services écosystémiques. La présente section a vocation à présenter les principaux résultats de ces travaux.

Évaluation des services écosystémiques au niveau national

 Le JRC évalue à 18 milliards d’euros la valeur de huit services écosystémiques fournis en France en 2018[39][40]. Les données du JRC permettent de présenter la répartition de cette valeur totale entre écosystèmes et services écosystémiques (voir Graphique 3). Cette valeur provient avant tout des usages récréatifs (5,8 milliards d’euros), suivis par le service de purification de l’eau (4,7 milliards d’euros), la récolte de bois (2 milliards d’euros), le contrôle des inondations (1,8 milliard d’euros), la production agricole (1,6 milliard d’euros), la séquestration du carbone (1,1 milliard d’euros), la rétention des sols (969 millions d’euros) et la pollinisation (520 millions d’euros).

Ces services sont liés aux différents écosystèmes présents en France. Plus de la moitié de cette valeur peut ainsi être associée aux bois et forêts (8,4 milliards d’euros), puis aux terres cultivées (7,1 milliards d’euros) et aux prairies (2 milliards d’euros). Dans les écosystèmes agricoles, les services écosystémiques les plus importants en termes monétaires sont la purification de l’eau, la production agricole, la pollinisation et la rétention des sols[41]. Les bois et forêts se caractérisent par une contribution à la récolte de bois, au contrôle des inondations et à la séquestration de carbone. Les méthodes mobilisées pour l’évaluation reposant principalement sur les prix de marché ou sur les coûts observés (voir Tableau 2 ci-dessus), les résultats obtenus ne permettent que de refléter des valeurs d’usage des écosystèmes et des services écosystémiques. Par ailleurs, ces valeurs agrégées ne constituent que des valeurs partielles, fondées sur l’agrégation d’un nombre restreint de services écosystémiques. Elles ne représentent en aucun cas la valeur totale des services écosystémiques de la France, et encore moins la valeur de la nature en France.

L’interprétation de ces valeurs dépend des méthodes d’évaluation utilisées. Par exemple, la valeur du service de purification de l’eau des terres cultivées correspond au coût d’installation de marais artificiels pour retenir autant de nitrates que le font les écosystèmes de ces terres : il s’agit donc du coût de remplacement de ce service, dans un scénario très théorique de disparition du service fourni gratuitement par les écosystèmes. La valeur du service de contrôle des inondations correspond quant à elle à une estimation des dommages évités par le maintien des écosystèmes ; le contrefactuel utilisé pour estimer le service serait donc une situation dans laquelle ces écosystèmes ne contribueraient plus au contrôle des inondations, par exemple avec les terres imperméabilisées[42].

Le service de production agricole correspond à la part des rendements de grandes cultures qui ne sont pas dus à des interventions humaines (tels l’engrais, l’irrigation, etc.). En France, cette part est estimée à 15 % pour le blé tendre et 9 % pour le maïs, et elle est supérieure pour les systèmes agroécologiques, notamment en agriculture biologique[43]. La valeur obtenue (1,6 milliard d’euros par an) en prenant également en compte les prix de marché des productions est ainsi nettement inférieure à la valeur générée par les grandes cultures (45 milliards d’euros) en 2018.

Le graphique 4 compare les données du JRC avec celles obtenues dans le cadre du programme Efese. Le JRC et l’Efese évaluent respectivement à 18 et 49 milliards d’euros par an la valeur annuelle des huit services écosystémiques considérés, soit l’équivalent de 0,6 % à 1,8 % du PIB de la France en 2023. La valeur économique de ces services écosystémiques serait donc d’un ordre de grandeur similaire à celle d’un secteur comme l’industrie du luxe[44].

Évaluation monétaire des huit services écosystémiques étudiés à l’échelle de la France en 2018 et distribution des valeurs par type d’écosystème

Lecture : les écosystèmes liés aux terres cultivées sont associés à six des huit services écosystémiques étudiés, et leur valeur atteint 7,1 milliards d’euros par an.  Parmi ces services, la pollinisation représente 520 millions d’euros par an. 

Note : les valeurs sont données en millions d’euros pour l’année 2018. Pour le service de récréation dans la nature et de purification de l’eau, les données utilisées  sont celles de 2012, les données ultérieures disponibles étant des extrapolations des données de 2012. Certains services ne sont évalués que pour un type d’écosystème. C’est le cas du service de rétention des sols, évalué uniquement pour les terres cultivées, ou le service de séquestration de carbone, évalué uniquement  pour les bois et forêts. 

Source : Vallecillo et al. (2022) ; traitement : France Stratégie

En particulier, l’Efese évalue les usages récréatifs à 29 milliards d’euros par an en moyenne, alors que le JRC les évalue à seulement 6 milliards d’euros par an. Cette différence est d’autant plus importante que l’Efese ne calcule que les usages récréatifs en forêt, et pas dans les autres types d’écosystèmes. L’étude de l’Efese s’appuie sur des questionnaires individuels dans un échantillon représentatif de la population française, tandis que le JRC utilise des données agrégées par zones géographiques[45] pour évaluer la fonction de demande pour l’usage récréatif. L’approche du JRC est moins coûteuse en termes de données, mais également moins détaillée, ce qui peut expliquer en partie l’écart observé avec les chiffres de l’Efese.

L’évaluation du service de production agricole par l’Efese est nettement supérieure à l’évaluation du JRC, malgré une approche similaire visant à évaluer la contribution des seuls écosystèmes (hors engrais et irrigation) à la production agricole. Cette différence peut notamment s’expliquer par l’utilisation de modèles et de périmètres spatiaux différents et par la finesse de modélisation des pratiques agricoles[46][47].

L’évaluation du service de pollinisation cherche uniquement à analyser la contribution de la pollinisation à la production agricole. Pour cela des indices de dépendance des cultures aux insectes pollinisateurs (abeilles, papillons, cétoines, etc.), mesurant la perte de production induite par la disparition des pollinisateurs, sont mobilisés[48]. Ces indices atteignent par exemple 95 % pour les melons, et 65 % pour les pommes et les cerises. La dépendance est faible pour les oranges et les tomates (5 %), et nulle pour les céréales. La différence entre les chiffres du JRC (520 millions d’euros par an)[49] et de l’Efese (3,8 milliards d’euros par an en moyenne)[50] s’explique par le fait que le JRC prend en compte la capacité des habitats à accueillir des pollinisateurs grâce à un indicateur de présence de bourdons.

La valeur obtenue ne peut cependant être interprétée comme la valeur perdue en cas de disparition des pollinisateurs. En effet, ces approches ne monétarisent pas la valeur patrimoniale des pollinisateurs, ni leur contribution à la stabilité et au fonctionnement de nombreux réseaux alimentaires terrestres[51] qui, selon l’IPBES, sont essentielles[52]. Leur disparition mettrait l’humanité en péril puisque près de 90 % des espèces de plantes à fleurs sauvages dépendent, au moins en partie, du transfert de pollen par les animaux.

Notons enfin que l’évaluation de la valeur de séquestration du carbone provient d’un calcul original réalisé pour cette étude, et consistant à multiplier le flux annuel de carbone séquestré par la valeur d’action pour le climat[53], tandis que le JRC utilise les taux de taxation effectifs du carbone.

Valeurs marginales de services écosystémiques 

Les valeurs nationales de services écosystémiques ont un intérêt limité pour informer des processus de prise de décision, relatifs par exemple à un aménagement ayant un impact sur la biodiversité. En effet, dans ce cas ce sont des valeurs marginales de services écosystémiques, exprimant par exemple les pertes associées à la destruction d’un hectare de forêt, qui peuvent avoir un intérêt[54], notamment pour l’analyse coûts-bénéfices.

Le moyen le plus immédiat pour obtenir ces valeurs marginales est de diviser les estimations nationales de services écosystémiques par les surfaces concernées. En utilisant les chiffres du JRC, ce sont les zones humides qui ont la valeur marginale la plus élevée (585 euros par hectare et par an), suivies par les forêts et les bois (545 euros par hectare et par an), tandis que les zones urbaines n’ont une valeur que de 31 euros par hectare et par an. La limite de cet exercice est qu’il suppose que, pour chaque type d’écosystème, tous les hectares sont équivalents.

Le programme Efese a également cherché à développer des valeurs marginales de référence du service de séquestration de carbone dans différents types d’écosystèmes[55]. Ce service repose sur la capacité des écosystèmes à capter du carbone atmosphérique, notamment grâce à la croissance des plantes et des algues, et en le maintenant durablement dans les sols et la biomasse (la forêt par exemple). Les valeurs de référence obtenues représentent la perte de valeur monétaire induite par la destruction d’un hectare de ces espaces sur le long terme. Elles sont destinées à servir l’évaluation socioéconomique de projets impliquant la dégradation d’écosystèmes.

Une synthèse de ces valeurs du service de séquestration du carbone dans les écosystèmes est présentée dans le graphique 5. Pour chaque type d’écosystème, il existe une multitude de valeurs, représentées par le graphique en barres. Par exemple, parmi les écosystèmes forestiers, les valeurs du service écosystémique diffèrent entre une forêt de feuillus et une forêt de conifères. D’après ces données, la valeur du service de séquestration du carbone est la plus élevée dans les zones humides (près de 250 000 euros par hectare en moyenne), qui incluent les tourbières[56], ainsi que dans les lagunes, les herbiers et les mangroves (plus de 175 000 euros par hectare en moyenne). Viennent ensuite les écosystèmes forestiers (près de 100 000 euros par hectare en moyenne[57]) et les écosystèmes agricoles (plus de 30 000 euros par hectare en moyenne). Les écosystèmes urbains, qui incluent les espaces verts urbains, présentent les valeurs de référence les plus basses.

L’Efese a également produit des valeurs marginales du service de récréation dans les forêts de trois départements français, sur la base de la méthode des coûts de déplacement[58]. Les résultats montrent que dans les forêts les plus fréquentées, la valeur des usages récréatifs peut atteindre plus de 37 000 euros par hectare, alors que dans les forêts éloignées des agglomérations urbaines et dans les zones densément boisées, la valeur n’est que d’environ 10 euros par hectare.

Comparaison entre les valeurs de services écosystémiques produites par le JRC et par l’Efese

Note : le service de séquestration du carbone en France (colonne « Efese ») provient d’un calcul original réalisé pour cette étude, et consiste à multiplier le flux annuel  de carbone séquestré par la valeur d’action pour le climat. Les données Efese incluent également les données de l’Ifrecor. Dans la colonne « Efese », la valeur du  service de récréation dans la nature est une valeur moyenne. Dans les deux cas, les territoires ultramarins ne sont pas pris en compte. 

Lecture : selon les données du JRC, la somme des huit services écosystémiques évalués en France atteint 18 milliards d’euros par an, tandis que selon les données  de l’Efese elle atteint 49 milliards d’euros par an. 

Source : Vallecillo et al. (2022), traitement : France Stratégie

Utilisation des valeurs de la biodiversité

Dans son évaluation méthodologique sur les multiples valeurs de la nature, l’IPBES note que les valeurs produites sont peu utilisées : seuls 5 % des cas d’étude rapportent une utilisation de ces valeurs dans des processus de prise de décision[59]. C’est tout particulièrement le cas (2 %) des valeurs monétaires de services écosystémiques[60]. Cette faible proportion s’explique en grande partie par le fait que la conception de ces évaluations est rarement intégrée dans les processus de prise de décision ; elles ne sont donc pas de nature à répondre à une demande des parties prenantes, qui ne les utilisent pas.

Par ailleurs, les valeurs mobilisées dans les processus de prise de décision ne représentent souvent pas la diversité des valeurs attachées à la nature. Compte tenu de la difficulté à estimer des valeurs de non-usage, les évaluations s’attachent le plus souvent à quantifier un nombre limité de services écosystémiques. Or, fonder une décision de gestion sur la seule prise en compte de certains services écosystémiques peut avoir des conséquences négatives sur des espèces ou des habitats associés. Par exemple, maximiser la récolte de bois et la séquestration de carbone d’une forêt peut se faire aux dépens de la biodiversité forestière[61].

Comptabilité des écosystèmes 

Les valeurs monétaires obtenues au niveau national, comme celles présentées dans la partie 2.1, peuvent intégrer des comptes nationaux d’écosystèmes. L’enjeu principal de cette intégration serait d’être en mesure d’effectuer des comparaisons entre différents services écosystémiques ou actifs naturels sur une base cohérente avec celle de l’évaluation des produits et actifs enregistrés dans les comptes nationaux, et ainsi enrichir la mesure de la richesse nationale. À titre d’exemple, la comptabilité nationale prend en compte la valeur issue de la vente du bois récolté (environ 3 milliards d’euros par an), mais pas la valeur issue des usages récréatifs en forêt (13 à 45 milliards d’euros par an)[62], qui lui est au minimum quatre fois supérieure.

La Commission européenne a proposé en 2022 de compléter le règlement sur la comptabilité économique de l’environnement en y ajoutant des comptes d’écosystèmes et de services écosystémiques, en termes biophysiques[63]. Les comptes proposés permettent de décrire l’étendue des différents types d’écosystèmes européens, leur état de conservation et les flux annuels de sept services écosystémiques : la production agricole, la pollinisation des cultures, la fourniture de bois, l’épuration de l’air, la régulation climatique locale, la régulation climatique mondiale, et les services culturels liés au tourisme de nature.

Ce règlement se fonde sur la norme statistique internationale établie dans le système de comptabilité des écosystèmes et services écosystémiques (System of Environmental Economic Accounting − Ecosystem Accounting, SEEA-EA)[64]. Bien que seul le volet biophysique du SEEA-EA ait été adopté comme norme statistique internationale[65], la Commission se laisse la possibilité d’introduire des comptes monétaires à la suite d’une étude de faisabilité qui est actuellement en cours.

Évaluation socioéconomique de projets portés par les pouvoirs publics 

Certaines valeurs peuvent également être mobilisées pour l’évaluation socioéconomique des projets d’investissement ou de règlementations, qui aide à décider de la pertinence de leur réalisation[66]. L’évaluation socioéconomique impose en effet de mener un recensement détaillé de toutes les conséquences attendues d’un investissement public ; aussi, lorsque ces dernières ne donnent pas lieu à des transactions monétaires (on parle alors d’« effets non marchands »), « il faut recourir à des valeurs tutélaires lorsqu’elles existent, ou à des études spécifiques[67] ».

Un premier type de valeur tutélaire peut être issu d’évaluations de services écosystémiques[68]. En particulier, les valeurs de référence du service de séquestration du carbone par les écosystèmes développées dans le cadre du programme Efese[69] pourraient être intégrées dans le guide de l’évaluation socioéconomique des projets d’investissement[70]. Le service culturel de récréation dans la nature, dont la valeur est particulièrement élevée au niveau national (voir Graphique 4), pourrait également être intégré dans les évaluations socioéconomiques de projets d’aménagement. Pour ce faire, il serait envisageable de commencer par étendre à l’ensemble des forêts françaises, voire à l’ensemble des écosystèmes, les valeurs obtenues au niveau départemental dans le rapport Efese sur les usages récréatifs en forêt[71]. Rappelons tout de même que ces valeurs de services écosystémiques n’offrent qu’une vision très partielle des valeurs de la biodiversité.

Un second type de valeur tutélaire peut reposer sur une approche coût-efficacité, qui requiert de se donner un objectif et de mesurer les coûts pour l’atteindre[72], permettant de contourner les difficultés méthodologiques liées à l’évaluation des variations de bien-être associées à un changement d’état de la biodiversité. Dans ce cadre, l’objectif utilisé pour établir la valeur tutélaire peut être de réduire ou d’éliminer une pression sur la biodiversité (voir l’Encadré 3 dans le cas d’un objectif restreint au ZAN), mais également de maintenir ou restaurer le bon état d’un écosystème. Les coûts nécessaires à l’atteinte de tels objectifs sont a priori mesurables[73] et englobent l’ensemble des valeurs impliquées dans la définition de cet objectif.

Valeurs de référence du service de séquestration du carbone dans différents types d’écosystèmes

Note : les données présentées dans le rapport de l’Efese ont été mises à jour par France Stratégie avec les valeurs d’action pour le climat pour 2024 de la trajectoire  élaborée en 2019, et regroupées par grand type d’écosystème.

Lecture : les valeurs de référence des zones humides sont comprises entre 75 210 euros et 395 816 euros par hectare, avec une médiane de 212 875 euros par hectare  et une moyenne de 240 373 euros par hectare. Chaque boîte à moustache montre la médiane (ligne horizontale), la moyenne (croix), les 1er et 3e  quartiles (bords de  la boîte) et les valeurs extrêmes.

Source : CGDD (2019) ; traitement : France  Stratégie

Dans le présent encadré, nous proposons un modèle permettant de calculer une valeur d’action pour les sols utilisable dans le cadre de l’évaluation socioéconomique. Pour réaliser une étude coût-efficacité de l’évaluation de l’action pour les sols, il faut déterminer l’objectif quantitatif à atteindre, à l’instar de l’objectif de température ou, de manière équivalente, du budget carbone pour le changement climatique. Pour la France, l’objectif « Zéro artificialisation nette » pour les sols à l’horizon 2050 pourrait servir d’objectif. On obtiendrait alors une valeur de l’artificialisation (en euros par hectare) qui mesurerait le coût d’évitement de l’artificialisation. Une telle approche permettrait de s’affranchir de l’évaluation des gains écologiques associés.

Il serait pertinent d’utiliser un modèle stylisé d’artificialisation des sols dans lequel la valeur de l’artificialisation, ou valeur de l’action pour les sols, est associée à une contrainte sur le niveau maximal d’artificialisation acceptable (tout comme il existe un budget carbone dans certains modèles de changement climatique). Pour que celui-ci reste aussi simple que possible, les agents tirent leur utilité d’une consommation qui, dans le même temps, artificialise et donc dégrade les sols.

Conformément à une approche coût-efficacité, aussi utilisée pour la valeur de l’action pour le climat[78], le prix fictif de l’artificialisation associé à la contrainte sur l’artificialisation maximale autorisée fournit le coût marginal des actions de restauration et de renaturation à entreprendre afin de respecter la contrainte d’artificialisation.

Ce modèle stylisé pourrait servir de base à la construction d’un modèle macroéconomique plus détaillé, qui, calibré sur la France, fournirait une valeur de l’action pour les sols. Dans ce cadre, il conviendrait de prendre en compte l’hétérogénéité des sols soumis à artificialisation, et notamment les différences entre zones urbaines et rurales, ce qui amènerait à calculer des valeurs tutélaires territoriales.

Accompagnement de processus de prise de décision locaux 

La production de valeurs à un niveau local peut également accompagner des processus de prise de décision locaux. Par exemple, l’évaluation des bénéfices associés à la création d’une aire protégée peut contribuer à renforcer le dossier de création de cette aire protégée, notamment dans le cadre d’une expérience de choix[74]. De la même manière, des expériences de choix permettent d’identifier les caractéristiques privilégiées par les visiteurs de forêts[75] ou de parcs naturels régionaux[76].

Comme le souligne le rapport de l’IPBES, pour être utiles les valeurs obtenues doivent s’inscrire dans le cadre d’un processus de prise de décision bien identifié (projet d’aménagement, projet de création d’aires protégées, etc.), impliquant les parties prenantes et assurant un rapportage clair des valeurs obtenues et de leurs limites[77].

Intérêt pour les entreprises 

Les entreprises soulignent de plus en plus leurs impacts et dépendances vis-à-vis de la biodiversité, dans le cadre de leurs stratégies et reportings extrafinanciers : publiée en 2022, la Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) couvre les trois enjeux ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance) et comprend des mesures de reporting sur les incidences positives et négatives de l’entreprise sur la biodiversité et les écosystèmes, ainsi que sur les actions menées pour prévenir ou atténuer les impacts négatifs, protéger et restaurer la biodiversité et les écosystèmes. Dans ce cadre, elles peuvent mobiliser des données relatives aux valeurs de services écosystémiques par exemple.

Cet intérêt s’explique par le fait que l’érosion des écosystèmes peut affecter leur résultat financier, mais aussi par le besoin de s’assurer de la soutenabilité de leur activité vis-à-vis de la protection de la biodiversité. Plusieurs entreprises expérimentent ainsi l’intégration d’une comptabilité écologique à leur comptabilité classique. C’est ce que font le projet CARE (Comprehensive Accounting in Respect of Ecology), fondé sur l’approche des coûts écologiques non payés[79], et les exercices de triple comptabilité, qui prennent en compte les coûts environnementaux et sociaux en plus des coûts financiers.

Les autorités de régulation du système bancaire s’intéressent aussi aux risques financiers (physiques et de transition) associés à la biodiversité. Une étude publiée en 2021 par des chercheurs de la Banque de France, l’Agence française pour le développement, l’Office français de la biodiversité et CDC Biodiversité a montré que 42 % du montant des actions et obligations détenues par des institutions financières françaises était émis par des entreprises non financières qui sont fortement ou très fortement dépendantes d’au moins un service écosystémique[80]. Par ailleurs, le Network for Greening the Financial System (NGFS) − un réseau de banques centrales − cherche à mettre en place des « stress-tests biodiversité » similaires aux stress-tests climatiques qui existent déjà[81].

Conclusion

Les valeurs associées à la biodiversité sont diverses, tout comme les méthodes permettant de les estimer. Malgré cela, la plupart des évaluations se concentrent sur une partie seulement des valeurs associées à la nature, principalement des valeurs d’usage.

C’est tout particulièrement le cas des évaluations monétaires de la nature, qui se concentrent sur l’évaluation des variations de bien-être associées à certains services écosystémiques bénéficiant directement aux activités humaines. Une approche complémentaire propose de privilégier l’évaluation des coûts de renaturation ou de maintenance permettant d’atteindre les objectifs de bon état écologique des écosystèmes. Se pose alors la question de la manière de fixer ces objectifs et de leur acceptabilité sociale. Une piste prometteuse consiste en particulier à exploiter l’objectif « Zéro artificialisation nette » qui permet de déduire, via le coût associé au respect de cette contrainte, une valeur associée à la non-artificialisation.

Ces évaluations monétaires sont utiles pour éclairer des processus de décision relatifs à la gestion de la biodiversité, mais elles ne permettent pas de décrire de façon satisfaisante la contribution de la nature à la richesse nationale au sein des comptes de l'environnement. En outre, elles ne peuvent se substituer à des processus délibératifs légitimes et représentatifs, avec les parties prenantes concernées, afin de prendre en compte l’ensemble des perspectives et valeurs relatives à la biodiversité, et aussi de renforcer l’acceptabilité des décisions.

[1] IPBES (2019), « Summary for policymakers of the global assessment report on biodiversity and ecosystem services », novembre. 

[2] Indicateur « oiseaux communs » de l’Observatoire national de la biodiversité. 

[3] La Convention sur la diversité biologique est l’un des traités internationaux adoptés lors du Sommet de la Terre à Rio de Janeiro en 1992. 

[4] Convention sur la diversité biologique (2022), Cadre mondial de la biodiversité de Kunming-Montréal, décembre. 

[5] IPBES (2022), « Summary for policymakers of the methodological assessment report on the diverse values and valuation of nature of the intergovernmental science-policy platform on biodiversity and ecosystem services », juillet. 

[6] Cela comprend la diversité au sein d’une espèce, entre espèces, et des écosystèmes. 

[7] L’expression « valeurs de la biodiversité » est ainsi une simplification : dans les faits, ce sont les entités et les processus constitutifs de la biodiversité qui peuvent faire l’objet d’évaluations. 

[8] Diaz S. et al. (2015), « The IPBES Conceptual Framework — connecting nature and people », Current Opinion in Environmental Sustainability, vol. 14, juin. 

[9] Millennium Ecosystem Assessment (2005), Ecosystems and Human Well-Being: Synthesis. 

[10] Chevassus-au-Louis et al. (2009), Approche économique de la biodiversité et des services liés aux écosystèmes : contribution à la décision publique, rapport, avril. 

[11] TEEB (2010), The Economics of Ecosystems and Biodiversity: Mainstreaming the Économics of Nature. A Synthesis of the Approach, Conclusions and Recommendations of TEEB, octobre. 

[12] Dasgupta P. et al. (2021), The Economics of Biodiversity: The Dasgupta Review, février. 

[13] Commissariat général au développement durable/Efese (2020), Rapport de première phase de l’Évaluation française des écosystèmes et des services écosystémiques, septembre. 

[14] L’Efese a proposé plus récemment une troisième catégorie, les « valeurs écologiques ». 

[15] IPBES (2022), Summary for Policymakers of the Methodological Assessment Report on the Diverse Values and Valuation of Nature, p.19, juillet. 

[16] Par définition, les valeurs intrinsèques ne se prêtent pas à l’évaluation. Aussi, les 20 % d’études mobilisant des valeurs intrinsèques sont aussi diverses que des études du fonctionnement de certains écosystèmes, indépendamment de leur utilisation, ou des questionnaires sur les motivations relatives à la protection de la nature. 

[17] Commissariat général au développement durable/Efese (2020), op. cit. 

[18] Économie/Eaufrance (2024), « Fiche de compréhension de la méthode des coûts de transports ». 

[19] Commissariat général au développement durable/Efese (2020), Rapport de première phase de l’Evaluation française des écosystèmes et des services écosystémiques, octobre

[20] Ibid. 

[21]. Bouchet V. et al. (2021), « Évaluations économiques des services rendus par la biodiversité », Trésor-Éco, vol. 294, décembre. 

[22] Brander L. M. (2024), « Economic values for ecosystem services: a global synthesis and way forward », Ecosystem Services, vol. 66, mars

[23] Le transfert de valeurs consiste à utiliser des valeurs produites sur un cas d’étude et de les utiliser dans un autre cas d’étude. Par exemple, si un évaluateur utilise une valeur produite dans une autre région ou un autre pays, il s’agit d’un transfert de valeurs. Voir Atkinson G., Braathen N. A., Groom B. et MouratoIl S. (2019), Analyse coûts-avantages et environnement, rapport, chapitre 6. 

[24] Le prix de marché résulte de la confrontation de l’offre et de la demande, cette dernière fournissant le consentement à payer pour la dernière unité acquise. 

[25] Il s’agit du chiffre d’affaires d’activités dépendant des écosystèmes, et non de la contribution des écosystèmes à ce chiffre d’affaires. De plus, ce chiffre ne prend en compte que les biens ou services marchands. 

[26] Commissariat général au développement durable (2020), op. cit. 

[27] Vallecillo et al. (2022), Ecosystem Services Accounts: Maps for 7 Ecosystem Services Produced in KIP INCA 2018 Updates, European Commission, Joint Research Centre (JRC).

[28] Vanoli A. (2015), « Comptabilité nationale et prise en compte du patrimoine naturel », La Revue du CGDD, décembre. 

[29] Mongruel R. et al. (2018), Les écosystèmes marins et côtiers, Efese. 

[30] Costanza R. et al. (1997), « The value of the world’s ecosystem services and natural capital », Nature, vol. 387, CGDD, mai.

[31] Notons néanmoins que l’amélioration des questionnaires permet de réduire les biais (avec des questions ouvertes par exemple ou le contrôle par la localisation des répondants). 

[32] Johnston R. J. et al. (2017), « Contemporary guidance for stated preference studies », Journal of the Association of Environmental and Resource Economists, vol. 4. 

[33] Qui peuvent alors soit refuser de répondre, soit répondre par un « zéro de protestation », ce qui, dans les deux cas, pose un problème à l’évaluateur. 

[34] Chevassus-au-Louis et al. (2009), op. cit. 

[35] Commissariat général au développement durable (2020), op. cit. 

[36]. Pascal N. et al. (2016), Valeur économique des services rendus par les récifs coralliens et écosystèmes associés des Outre-mer français, rapport technique, Ifrecor, juin. 

[37] Vallecillo S. et al. (2022), op. cit. 

[38] Vysna V. et al. (2021), Accounting for ecosystems and their services in the European Union (INCA). Final report from phase II of the INCA project aiming to develop a pilot for an integrated system of ecosystem accounts for the EU, rapport statistique, Publications office of the European Union, Luxembourg. 

[39] Vallecillo S. et al. (2022), op. cit. 

[40] Ces huit services ont été sélectionnés en fonction de la disponibilité de données au niveau européen. Certains services écosystémiques importants comme la contribution de la végétation à l’atténuation des conséquences des tempêtes ou de l’érosion côtière ne sont ainsi pas pris en compte. 

[41] Notons que les terres cultivées participent à la pollution de l’eau, lorsque les engrais et les pesticides sont utilisés dans des quantités supérieures au service de purification des sols.

[42] Ces dommages, et donc la valeur du service de contrôle des inondations, sont naturellement hétérogènes sur le territoire. 

[43] Vallecillo S. et al. (2019), op. cit. ; Conseil national de l’industrie (2022), « Contrat stratégique de filière Mode et Luxe 2023-2027 ». 

[44] Conseil national de l’industrie (2022), ibid.

[45] Ces zones géographiques sont les unités administratives locales définies par Eurostat. 

[46] Therond O. et al. (2017), Écosystèmes agricoles, Efese, novembre. 

[47] Vallecillo S. et al. (2019), op. cit. 

[48] La pollinisation peut être réalisée par le vent, l’eau ou les animaux. L’entomogamie, ou pollinisation par les insectes, concerne 90 % des espèces de plantes à fleurs dans le monde (rapport IPBES sur la pollinisation). 

[49] Vallecillo S. et al. (2018), op. cit. 

[50] Commissariat général au développement durable : Efese (2016), Le service de pollinisation, op. cit. 

[51] Les plantes sauvages fournissent un large éventail de ressources, tels de la nourriture et des abris, à des invertébrés, des mammifères et des oiseaux. 

[52] IPBES (2016), Summary for Policymakers of the Assessment Report on Pollinators, Pollination and Food Production, avril. 

[53] Quinet A. et al. (2019), La valeur d’action pour le climat. Une valeur tutélaire du carbone pour évaluer les investissements et les politiques publiques, Rapport, France Stratégie, février. 

[54] Dasgupta P. (2021), The Economics of Biodiversity: the Dasgupta Review, février. 

[55] Commissariat général au développement durable/Efese (2019), La séquestration du carbone par les écosystèmes français, La Documentation française, coll. « Théma Analyse », mars

[56] Les zones humides stockent davantage de carbone à l’hectare que les autres types d’écosystèmes, car l’absence d’oxygène y ralentit la décomposition de la matière organique issue de la végétation et les émissions de gaz à effet de serre associées. 

[57] Notons que ces chiffres ont été établis avant les études récentes montrant la baisse du potentiel de stockage des forêts due notamment au changement climatique. 

[58] Abildtrup J., Garcia S. et al. (2020), Les usages récréatifs des forêts métropolitaines, Efese, La Documentation française, op. cit. 

[59] IPBES (2022), op. cit. 

[60] Laurans Y. et al. (2013), op. cit. 

[61] Arambourou H. (2023), « Vers une planification de la filière forêt-bois », La Note d’Analyse, n° 124, France Stratégie, juillet.

[62] Efese (2020), op. cit. 

[63] Commission européenne (2022), Règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) nº 691/2011 en ce qui concerne l’introduction de nouveaux modules relatifs aux comptes économiques de l’environnement, juillet. 

[64] United Nations et al. (2021), System of Environmental-Economic Accounting—Ecosystem Accounting (SEEA EA), septembre. 

[65] Commission statistique des Nations-Unies (2021), Report of the Commission on its fifty-second session, mars. 

[66] Notons que la France mène également des analyses coûts-bénéfices des programmes de mesures issus de la directive-cadre sur l’eau, en mobilisant des valeurs de référence de services écosystémiques. Sur ce sujet, voir Feuillette S. et al. (2015), « Évaluation monétaire des services écosystémiques. Un exemple d’usage dans la mise en place d’une politique de l’eau en France », Natures Sciences Sociétés, vol. 23. 

[67] Guesnerie R. et al. (2023), Guide de l’évaluation socioéconomique des investissements publics. Comité d’experts des méthodes d’évaluation socioéconomique des investissements publics, Rapport, France Stratégie, septembre. 

[68]. Par exemple, les services écosystémiques perdus par l’artificialisation de surfaces forestières ne sont pas pris en compte dans l’évaluation du Grand Paris Express. Voir Kervinio Y. et Quinet E. (2022), « Infrastructures de transport et biodiversité », Le Grand Paris Express. Les enjeux pour l’environnement, édition Economica, mai, 256 p. 

[69]  Commissariat général au développement durable/Efese (2019), La séquestration du carbone par les écosystèmes français, op. cit. 

[70]  Ces valeurs intègrent une projection du flux de service dans le futur, ce qui est une démarche appropriée à l’évaluation socio-économique, mais qui ajoute un degré de complexité important. 

[71].  Abildtrup J., Garcia S. et al. (2020), Les usages récréatifs des forêts métropolitaines, op. cit. 

[72]  Kervinio Y. et Vergez A. (2018), « Agir face à la complexité des valeurs de la biodiversité. Joindre les approches normative et “coût-efficacité” », Responsabilité et Environnement, vol. 92, octobre.

[73] Vanoli A. (2015), « Comptabilité nationale et prise en compte du patrimoine naturel », La Revue du CGDD, décembre. 

[74] Christie et al. (2015), « Valuing Marine and Coastal Ecosystem Service Benefits: Case Study of St Vincent and the Grenadines’ Proposed Marine Protected Areas », Ecosystem Services, vol. 11, février. 

[75] Abildtrup J., Garcia S. et al. (2020), Les usages récréatifs des forêts métropolitaines, op. cit. 

[76]  Kervinio Y. et al. (2021), Mettre en valeur les espèces sauvages et leurs fonctions écologiques dans les territoires. Recommandations à partir du cas de la réintroduction des vautours dans les parcs naturels régionaux du Vercors et des Baronnies provençales, La Documentation française, avril. 

[77]  IPBES (2022), Summary for Policymakers of the Methodological Assessment Report on the Diverse Values and Valuation of Nature of the Intergovernmental Science-Policy Platform on Biodiversity and Ecosystem Services, op. cit. 

[78] Quinet A. et al. (2019), La valeur d’action pour le climat. Une valeur tutélaire du carbone pour évaluer les investissements et les politiques publiques, op. cit.

[79] Rambaud A. (2022), « CARE : repenser la comptabilité sur des bases écologiques », L’Économie Politique, vol. 1. 

[80] Svartzman R. et al. (2021), A « Silent Spring » for the Financial System? Exploring Biodiversity-Related Financial Risks in France, Working paper, août ; Hadji-Lazaro P. et al. (2024), « Biodiversity loss and financial stability as a new frontier for central banks: An exploration for France », Ecological Economics. 

[81] NGFS (2023), Recommendations Toward the Development of Scenarios for Assessing Nature-Related Economic and Financial Risks, décembre.

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