Alors que le projet de loi sur l’égalité femmes-hommes vient d'être adopté mardi à l'Assemblée nationale, la mixité dans les milieux populaires reste un enjeu majeur.
Le projet de loi pour l’égalité entre les femmes et les hommes pose bien le caractère systémique des enjeux en présence : en particulier, le partage inégal du travail parental, indissociable des inégalités dans la sphère professionnelle. Au-delà, et comme nous l’exposons dans un rapport sur les stéréotypes filles-garçons remis à Najat Vallaud-Belkacem le 15 janvier dernier, un faisceau de contraintes cumulatives vient précocement fermer l’horizon des possibles des jeunes.
En effet, à l’école, en famille, dans les processus d’orientation, dans les loisirs ou dans la santé, les institutions, et les ressources que celles-ci constituent, clivent dès le plus jeune âge les destins des jeunes filles et garçons, tout particulièrement dans les classes populaires. Il ne faudrait pas que la lutte contre le plafond de verre ou l’accès à la parité dans les fonctions dirigeantes - objectifs très importants - occulte ce phénomène. Les jeunes des milieux populaires sont, plus que d’autres, socialisés dans des environnements insuffisamment mixtes et cela pénalise leurs trajectoires individuelles. Dans leur scolarité comme dans leurs loisirs se perpétuent des entre-soi féminins et masculins qui tendent à figer les identités et les devenirs sociaux. Un exemple paradigmatique l’illustre particulièrement bien.
En matière de mixité des métiers, on associe souvent la lutte contre les inégalités à la promotion des filles ingénieurs. Or, s’il y avait 3% de femmes ingénieurs au début des années 80, il y en a maintenant 34% dans les nouvelles générations. De même, les métiers de cadres ont dans l’ensemble progressé vers la mixité (même si ce n’est pas le cas des fonctions dirigeantes). En revanche, les professions moins qualifiées sont restées très peu mixtes : soit très masculines, soit très féminines. Et cela se peut se décider très tôt : plus de 20% d’une classe d’âge se trouve dans des formations «non mixtes» (moins de 30% de l’autre sexe) dès la fin de la troisième, à un âge clé de la construction identitaire. Par contraste, la Terminale S est la filière la plus mixte.
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