Vidéo Débat : Comment renforcer le fonctionnement de la zone euro ? Macroéconomie Pour Hélène Rey, professeur à la London Business School et co-auteur du rapport Reinforcing the Eurozone*, la gouvernance de la zone euro appelle de profonds changements institutionnels. C’est une nécessité. Et même une urgence tant le risque de désintégration est élevé et étroite la fenêtre d’opportunité politique pour de tels changements. Publié le : 10/06/2016 Mis à jour le : 23/12/2024 Transcription Fermer la transcription Comment renforcer le fonctionnement de la zone euro ? Renforcer la zone euro, c'est le sens des propositions d'un rapport rédigé par un groupe d'experts internationaux. Helélenne Reay, professeur d'économie à la London Business School, l'a présenté à France Stratégie. Son constat est partagé par tous : la zone euro reste fragile avec des risques de naufrage de pays entiers. Son rapport propose avant tout des mécanismes pour mieux contrôler la dette. Quel est le mécanisme qui assure la cohérence des politiques des uns et des autres avec le fait qu'ils partagent la même monnaie ? Est-ce un mécanisme reposant sur des institutions, avec des sanctions ou des directives du Conseil des ministres européens ? Ou s'agit-il plutôt de mécanismes de responsabilité individuelle, où les États s'exposeraient davantage à la pression des marchés, augmentant ainsi les risques ? La solution avancée par les universitaires consiste à placer l'excédent de dette des pays dans un fonds commun européen. Dans le même temps, les banques détiendraient non pas la dette de leur pays, mais une part de dette de chaque pays, pour limiter les risques pesant sur chaque banque. Derrière cette idée se trouve un principe de solidarité, mais aussi la question du partage des risques et des responsabilités. La solidarité est nécessaire dans une union monétaire, mais elle peut impliquer davantage de contraintes et un droit de regard accru des partenaires sur les politiques nationales. Aujourd'hui, il existe un équilibre entre solidarité et contrôle, mais des propositions émergent pour définir plus clairement la frontière entre partage des risques et responsabilité individuelle. Cette solution suscite néanmoins le débat : incitera-t-elle les États à ignorer le pacte de stabilité et à s'endetter davantage, comptant sur un filet de sécurité européen ? Certains experts expriment leurs réserves, se demandant si des États, une fois leur dette restructurée, ne profiteraient pas du mécanisme pour accumuler à nouveau déficit et dette. Ces critiques rappellent l'importance de la capacité des marchés à limiter le niveau d'endettement des pays. Bien que des améliorations aient été constatées ces dernières années dans les déficits des pays de la zone euro, le sujet reste complexe. Tout le monde s'accorde cependant sur un point : pour éviter que des pays sombrent à nouveau dans la banqueroute, il est indispensable de trouver une nouvelle gouvernance. Mais si ce point a fait consensus lors du débat organisé à France Stratégie le 10 juin 2016, les propositions avancées par le rapport pour y parvenir ont été largement discutées, notamment par Emmanuel Massé, chef du service des politiques macroéconomiques et des affaires européennes à la DG Trésor. À commencer par la question de la résurgence des risques qu’impliquerait la mise en place d’un mécanisme « quasi automatique » de restructuration des dettes souveraines à partir d’un certain seuil. L’avantage d’un tel mécanisme, a expliqué Hélène Rey, c’est qu’il établit (en principe) une stricte discipline budgétaire par les marchés. Concrètement, le régime de restructuration serait complété par la création d’un nouvel actif « synthétique » (« safe asset »), sorte de panier pondéré d’actifs classés selon leur risque, c’est-à-dire, pour simplifier, un panachage de dettes souveraines géographiquement diversifiées, que les banques pourraient substituer à la dette souveraine devenue plus risquée. Un fonds de stabilité européen serait par ailleurs créé pour éviter le déclenchement d’une crise auto-réalisatrice après l’annonce de la mise en place du régime de restructuration. Abondé par les États membres (à hauteur de 0,5% de leur PIB annuel), ce fonds permettrait de racheter une part de la dette souveraine existante afin de faire passer les pays sous le seuil de déclenchement d’une restructuration de dette. Quels sont les avantages et les incitations pour les parties prenantes du « deal » ? Pour l’État membre bénéficiaire d’une restructuration, c’est assez simple : en cas de crise il retrouve, après restructuration de sa dette, un accès aux marchés financiers. Pour les autres, c’est bien la stabilité de la zone euro qui est en jeu, avec une limitation des externalités et donc du risque de crise posé par une dette souveraine trop élevée dans un pays voisin. Dans ce schéma, mécanisme de restructuration et traitement prudentiel de l’exposition au risque souverain se complètent dans un cadre qui garantit la discipline budgétaire par le levier de l’accès aux marchés financiers. Mais qu’en est-il de l’aléa moral ? Question récurrente dans la salle que celle touchant au risque d’incitation à « laisser filer les déficits » que ferait courir la création de ce « filet de sécurité » ou de ce « fonds de rédemption » européen qui, en quelque sorte, rendrait moins coûteux le fait de faire défaut sur sa dette. Question corolaire qui a également fait débat : est-il rationnel de miser sur la capacité de marchés financiers, par nature court-termistes, à limiter l’endettement? Ne faudrait-il pas plutôt miser sur les « freins constitutionnels » de type « règles d’or » pour exercer une réelle discipline sur les dettes souveraines ? Cependant, la réponse à cette question, comme à celle de la légitimité du partage des risques, réside sans doute moins dans le paramétrage de ce que serait « la nouvelle architecture de la zone euro » que dans l’arbitrage politique. Comme le souligne Jean Pisani-Ferry, commissaire général de France Stratégie, la gouvernance de la zone euro repose sur deux types de mécanismes contraignants. Le premier passe par des institutions européennes qui auraient un pouvoir de sanction, le second par la responsabilité de chaque État membre face aux marchés financiers. Choisir un mode de gouvernance pour la zone euro, c’est donc arbitrer entre « plus de contraintes institutionnelles communes ou plus de risques de pression des marchés ». *Reinforcing the Eurozone and Protecting an Open Society. Monitoring the Eurozone, Centre for Economic Policy Research Press, 2016. Partager la page Partager sur Facebook - nouvelle fenêtre Partager sur X - nouvelle fenêtre Partager sur Linked In - nouvelle fenêtre Partager par email - nouvelle fenêtre Copier le lien dans le presse-papier Pour aller plus loin France : une embellie économique durable ? Présentation de l’étude OCDE France 2017 par Peter JARRETT, chef de division, et Antoine GOUJARD, senior économiste, département des Affaires économiques de l’OCDE ; Nicola BRANDT, cheffe du bureau France/Pologne de l'OC... 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