Face à des déficits publics importants et une dette publique élevée et croissante, la France a engagé une politique de réduction des déficits, en augmentant les recettes et en cherchant à réduire la part des dépenses publiques.
Dans deux notes alimentant la réflexion sur le rapport Quelle France dans 10 ans ?, totalement inédites et publiées ce jour, France Stratégie a analysé et comparé les méthodes employées par de nombreux pays développés pour réduire leurs dépenses publiques depuis 1990. France Stratégie a également cherché à comparer, par secteur, l’efficience (rapport coût/efficacité) des dépenses publiques en France, à celle d’autres pays européens.
Au-delà d’une simple réflexion sur la réduction des dépenses publiques, France Stratégie s’est donc intéressé à une problématique essentielle : la répartition et l’optimisation des dépenses publiques.
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Réduction des dépenses publiques : grands enseignements des expériences internationales et bonnes pratiques
Contraints par leurs niveaux de déficit et de dette publics élevés, la plupart des pays développés cherchent aujourd’hui à mettre en œuvre des stratégies de réduction des dépenses publiques.
L’étude montre que des réductions conséquentes des dépenses publiques sont intervenues dans le passé. Entre 1990 et 2007, 17 pays de l’OCDE ont réduit leurs dépenses d’au moins 3 points de PIB sur une période d’au moins 3 ans ; la France n’en fait pas partie.
Les principes et méthodes guidant les choix de réduction dépendent du contexte de chaque pays, il est donc difficile d’identifier ceux qui devraient être appliqués en toute occasion et ceux qui seraient optionnels.
Néanmoins, les expériences internationales permettent d’identifier quelques principes et bonnes pratiques de la réduction des dépenses :
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Revoir un nombre aussi élevé que possible de dépenses et opérer des arbitrages stratégiques entre les postes, les arbitrages stratégiques pouvant dans certains cas conduire à assumer la sanctuarisation de certaines dépenses ;
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Compléter les arbitrages stratégiques par des mesures d’efficience ;
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Impliquer pleinement l’administration dans le processus de telle sorte qu’elle propose et mette en œuvre des réductions de dépenses ambitieuses ;
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Informer les citoyens sur les choix stratégiques qui sont faits et qui engagent l’avenir du pays.
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Optimisation des dépenses publiques : certains secteurs présentent un niveau élevé d’inefficience en France
S’intéresser à la réduction des dépenses publiques nécessite d’identifier les postes représentant les dépenses les plus élevées :
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En France, les administrations publiques, qui regroupent l’Etat, les collectivités territoriales et les administrations de sécurité sociale dépensent chaque année l’équivalent de 54% du PIB (hors intérêts de la dette), ce qui classe le pays en troisième position au sein de l’UE27, derrière le Danemark et la Finlande en 2012.
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Les deux tiers environ des dépenses publiques en France comme dans la zone euro sont constituées par la dépense sociale lato sensu, i.e. : la protection sociale, la santé et l’éducation. Ces trois postes expliquent plus de 80% de l’écart à la moyenne européenne des dépenses publiques françaises, soit 5,8 points de PIB sur 6,5 point de PIB au total.
Une question se pose : ces écarts de dépenses sont-ils justifiés ?
La méthodologie utilisée dans la note consiste à comparer le rapport coût/efficacité, soit l’efficience des dépenses françaises, pour les postes présentant de gros écarts à la moyenne, à celles des autres pays européens en utilisant une frontière d’efficience.
Il ressort de l’analyse trois secteurs où des différences d’efficience existent avec les autres pays : l’enseignement secondaire, la santé et, dans une moindre mesure, les retraites.
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L’enseignement secondaire : la performance de la France la place notamment derrière l’Allemagne qui, avec des dépenses consacrées à l’éducation secondaire plus faibles que la France performe nettement mieux, et pratiquement aussi bien que la Finlande. La France se distingue notamment par un faible taux de diplômés du secondaire.
La France se situe assez loin de la frontière d’efficience, les dépenses en enseignement secondaire ne démontrent pas une performance remarquable au regard des autres pays. Il y a donc présomption d’inefficience. L’une des raisons souvent avancées pour justifier le coût de l’enseignement secondaire français tient à la pratique du redoublement. Une autre explication s’attache à l’allocation des dépenses entre les différents niveaux de l’enseignement.
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La santé : En santé, les performances relatives des systèmes sont très dispersées. L’indicateur de performance le plus complet, l’Euro Health Consumer Index, place l’Allemagne et la France dans des cadrans opposés en termes de corrélation dépenses / performance ; la première dépense peu (7 % du PIB) pour un système peu efficace, la seconde dépense beaucoup (8,2 % du PIB) et performe mieux. En revanche, avec des dépenses qui sont au niveau de celles de l’Allemagne, la Suède performe mieux que la France.
L’Euro Health Consumer Index est un indicateur très composite (facilitateur pour la comparaison internationale), mais limité en matière de diagnostic (efficacité). Sur cette base, la France se démarque par l’accès aux nouveaux médicaments, mais sa performance est mitigée par les difficultés d’accès aux soins.
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Les retraites : L’indicateur utilisé pour apprécier la performance, ou l’output, des dépenses du poste « vieillesse » est fondé sur les trois objectifs affichés de la politique de retraite : assurer aux retraités un revenu de remplacement en rapport avec les revenus perçus durant leurs dernières périodes d’activité, réduire la pauvreté parmi les plus de 65 ans et limiter les inégalités.
Cet indicateur situe la France au troisième meilleur niveau de performance, après le Luxembourg et les Pays-Bas mais devant la Suède. Ce bon résultat global est tiré par le taux de remplacement et le taux de pauvreté des plus de 65 ans. Sur le volet « inégalités » en revanche, la France performe moins bien, le rapport interquintile des plus de 65 ans y est de 4,5 en 2011, presque au même niveau qu’au Royaume-Uni, contre 3,9 en Allemagne et 3,3 en Suède.
La mise en regard de ces performances et des dépenses montre que la France est, de manière générale, le pays le plus éloigné de la frontière d’efficience ; à performance égale, la Suède a par exemple des dépenses relatives en vieillesse très inférieures à celles de la France.