Notre voisin d’outre-Rhin s’est alors assigné des objectifs ambitieux et volontaristes, à hauteur d’un véritable choix de société : plusieurs lois successives ont programmé la construction de près de 400 000 places de crèche sur la période 2005-2018. La France, où l’orientation en faveur de la prise en charge des jeunes enfants en dehors de la famille est plus ancienne, visait quant à elle une hausse de l’ordre de 150 000 places entre 2005 et 2017.
Sur cette période, on constate aujourd’hui que le taux de réalisation est d’environ 55 % pour la France, contre près de 90 % pour l’Allemagne. Portée par un effet de rattrapage et par une forte demande sociétale, celle-ci a pu ainsi doubler sa capacité d’accueil collectif des enfants de moins de 3 ans et dépasser même la France dans ce domaine.
L’ampleur et la rapidité de cette dynamique ne s’expliquent pas par un niveau plus faible des normes allemandes en matière de sécurité, de qualification du personnel ou d’encadrement des enfants accueillis. En revanche, la gouvernance du système de crèche, en particulier le droit opposable à une solution d’accueil pour les enfants à partir d’un an, semble avoir joué un rôle important pour stimuler la création de places en Allemagne. Cet exemple conduit à s’interroger sur la nécessité de faire évoluer la gouvernance de l’accueil de la petite enfance en France, dont le modèle actuel paraît avoir atteint ses limites.
Part des enfants de moins de 3 ans en accueil collectif en France et en Allemagne :
objectifs et réalisation, 2006-2015
Source : France Stratégie, d’après les données OCDE (indicateur PF3_2 « Participation rates in formal childcare and pre-school services, 0 to-2-yearolds, 1995-2015 ») pondérées par la place de l’accueil collectif dans l’accueil formel dans chaque pays (données ONPE pour la France ; données Landermonitor pour l’Allemagne). Le taux cible a été construit en ajoutant au taux de couverture constaté l’écart entre objectifs et réalisation tel que calculé dans le tableau 1 infra. Pour la France, cet écart ne concerne que les EAJE financés par la prestation de service unique.